La Terre et Mars ont des atmosphères très différentes. L'atmosphère sèche et froide de Mars est composée presque entièrement de dioxyde de carbone tandis que celle de la Terre est riche en azote et en oxygène. Sa densité atmosphérique est inférieure à un cinquantième de l'atmosphère terrestre, ce qui équivaut à la densité trouvée à environ 35 km au-dessus de la surface de la Terre.
Une nouvelle étude plonge plus profondément dans deux tempêtes de poussière qui se sont produites près du pôle Nord martien en 2019, et surveillées au printemps, une période où les tempêtes locales se préparent généralement autour de la calotte glaciaire en recul. Deux caméras à bord de la sonde Mars Express (la caméra de surveillance visuelle (VMC) et la caméra stéréo haute résolution) ainsi que la caméra MARCI à bord de la sonde Mars Reconnaissance Orbiter de la NASA, ont imagé les tempêtes depuis l'orbite.

Une tempête de poussière s'est formée en 2019 au pôle nord de Mars. Crédits: ESA
Les images de la caméra VMC montre que les tempêtes semblent croître et disparaître en cycles répétés sur une période de plusieurs jours, présentant des caractéristiques et des formes communes. Les formes en spirale sont notamment visibles dans les vues plus larges des images HRSC. Les spirales ont une longueur comprise entre 1000 et 2000 km et leur origine est la même que celle des cyclones extratropicaux observés aux latitudes moyennes et polaires de la Terre.
Les images révèlent un phénomène particulier sur Mars, et montrent que les tempêtes de poussière martiennes sont constituées de petites cellules nuageuses régulièrement espacées, disposées comme des grains ou des cailloux. Cette texture est également visible dans les nuages de l'atmosphère terrestre.

Crédits: ESA
Les textures familières sont formées par convection, par laquelle l'air chaud monte parce qu'il est moins dense que l'air plus frais qui l'entoure. Le type de convection observé ici est appelé convection à cellules fermées, lorsque l'air monte au centre de petites poches nuageuses, ou cellules. Les lacunes du ciel autour des cellules nuageuses sont les voies par lesquelles l'air plus frais descend sous l'air chaud qui monte.
Sur Terre, l'air ascendant contient de l'eau qui se condense pour former des nuages. Les nuages de poussière imagés par Mars Express montrent le même processus, mais sur Mars, les colonnes d'air montantes contiennent de la poussière plutôt que de l'eau. Le soleil chauffe l'air chargé de poussière, le faisant monter et former des cellules poussiéreuses. Les cellules sont entourées de zones d'air descendant qui contiennent moins de poussière. Cela donne lieu au motif granulaire également observé dans l'image des nuages sur Terre.

Crédits: ESA
En suivant le mouvement des cellules dans la séquence d'images, la vitesse du vent peut être mesurée. Le vent souffle au-dessus des caractéristiques nuageuses à des vitesses pouvant atteindre 140 km/h, provoquant l'allongement de la forme des cellules dans la direction du vent. Malgré les atmosphères chaotiques et dynamiques de Mars et de la Terre, la nature crée ces modèles ordonnés.
« Si l'on veut comparer l'atmosphère de Mars avec celle de notre planète, on pourrait facilement penser à un désert sec ou à une région polaire. Il est donc tout à fait inattendu qu'en suivant le mouvement chaotique des tempêtes de poussière, des parallèles puissent être établis avec les processus qui se produisent dans les régions tropicales humides, chaudes et décidément très différentes de Mars », commente Colin Wilson, de l'agence spatiale européenne.

La caméra VMC de la sonde Mars Express. Crédits: ESA
Les images VMC ont également permis de mesurer l'altitude des nuages de poussière. La longueur des ombres projetées est mesurée et combinée à la connaissance de la position du soleil pour mesurer la hauteur des nuages au-dessus de la surface martienne. Les résultats ont révélé que la poussière peut atteindre environ 6 à 11 km au-dessus du sol et que les cellules ont des tailles horizontales typiques de 20 à 40 km.
« Malgré le comportement imprévisible des tempêtes de poussière sur Mars et les fortes rafales de vent qui les accompagnent, nous avons vu que dans leur complexité, des structures organisées telles que des fronts et des schémas de convection cellulaire peuvent émerger », explique Agustín Sánchez-Levaga, qui dirige l'équipe scientifique de la caméra VMC. Une telle convection cellulaire organisée n'est pas unique à la Terre et à Mars. Les observations de l'atmosphère vénusienne par la sonde Venus Express montrent sans doute des schémas similaires.
La compréhension des tempêtes de poussière est pertinente pour les futures missions vers Mars. Dans les cas extrêmes, les tempêtes de poussière peuvent empêcher une grande partie de la lumière du soleil d'atteindre les cellules solaires des rovers à la surface de la planète rouge. En 2018, une tempête de poussière à l'échelle planétaire a non seulement bloqué la lumière du soleil atteignant la surface, mais a également recouvert de poussière les panneaux solaires du rover Opportunity de la NASA. Ces deux facteurs ont conduit le rover à perdre de l'énergie électrique, mettant fin à la mission. Source:
esa.int