Les futurs rovers martiens s'entraînent dans le désert marocain
En l'espace de 10 ans, Erfoud est devenue une destination incontournable pour la recherche spatiale européenne. Un engouement qui s'explique par la topologie de la région, mais aussi par les conditions d'accueil sur place. Alors qu’un soleil de plomb tape sur les dunes rocailleuses, plusieurs robots apparaissent à l’horizon. Sur quatre roues motrices, ces drôles de véhicules automatisés fouillent à l’aide de leur caméra la surface, sablonneuse ou rocailleuse, qu’ils parcourent. D’autres, munis d’antennes, scrutent les environs. Nous ne sommes pas sur la Lune, ni sur Mars, mais bien dans l’est du Maroc, à Erfoud. Parmi ces prototypes se trouve SherpaTT, un drôle de véhicule imaginé par le German Research Centre for Artificial Intelligence (DFKI) et doté de 4 roues motrices indépendantes dont l’écartement au sol varie de 1X1m jusqu’à 2,4X2,4m selon la nature du terrain : le rover évite automatiquement le basculement en faisant varier sa surface de sustentation pour y maintenir son centre de gravité. Le prototype de rover SherpaTT a également été testé dans le désert de l’Utah (États-Unis), une région qui présente elle aussi des terrains analogues à ceux qu’on trouve sur Mars. En décembre 2018, l’espace de quelques jours, cette région a été la terre d’accueil de robots créés par plusieurs agences spatiales européennes. Parmi les guest-stars présentes sur place, on retrouve notamment le robot Exomars qui posera ses roues et pinces sur la surface de la planète rouge à l’horizon 2020. La destination Erfoud intéresse également l’agence spatiale russe Roscosmos qui y a également effectué des tests courant 2018. Mais l’attractivité d’Erfoud pour la recherche spatiale ne date pas d’hier. Cela fait une dizaine d’années que la région d’Erfoud-Rissani accueille les tests d’agences spatiales souhaitant partir à la découverte de la planète rouge. Un engouement qui s’explique par les caractéristiques géologiques de la région, mais aussi l’environnement créé autour de ce business. Pour comprendre l’intérêt que suscite Erfoud, il faut remonter à 2007. Cette année-là, un projet est initié conjointement par l’université Cadi Ayyad de Marrakech et l’université de Pescara en Italie. Les deux institutions se mettent d’accord pour créer le centre Ibn Battuta, installé au cœur de l’université marrakchie. Le centre est chargé de la formation et doit alors servir de support pour les agences européennes désireuses de faire des tests d’instrumentations liées à l’exploration spatiale. Le centre est situé à quelques centaines de kilomètres d’Erfoud où de nombreuses similarités avec la planète Mars ont été identifiées. La région Erfoud-Rissani offre une variété de terrains existant sur la planète Mars, ce qui fait de la zone une plateforme formidable pour les tests de terrain. Le sable de la région présente en effet de nombreuses similarités avec celui que l’on peut retrouver sur la planète rouge. A cette similarité géologique vient également s’ajouter une ressemblance topographique. D’autres critères ont joué un rôle dans le choix d’Erfoud. Parmi eux, la proximité avec l’Europe, et la disponibilité des autorités marocaines. De nombreux tests effectués au Maroc n’auraient jamais pu avoir lieu sans le soutien des ministères de l’Intérieur, de l’Enseignement supérieur, des douanes et des wilayas, de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT). L’ANRT a notamment contribué à la mise en place, sur site, d’une connexion très haut débit permettant d’échanger des informations en temps réel avec les agences spatiales européennes. Si Erfoud fait office de destination favorite des chercheurs, elle n’est néanmoins pas la seule destination marocaine où ils peuvent effectuer leur test. En effet, les hauts responsables de l’ESA ont donné leur feu vert pour plusieurs sites marocains notamment dans la région de Zagora, d’Ouarzazate, au nord de Tan-Tan, à Tinghir et au sud d’Errachidia. A Erfoud, les Forces armées royales ont également eu leur rôle à jouer puisque certains éléments de l’armée sont mobilisés pour assurer la protection des scientifiques présents sur place. Dernier facteur, et non des moindres, la capacité d’accueil dans la région. En effet, plusieurs établissements hôteliers ont été construits dans la région afin d’accueillir les chercheurs mobilisés sur place.