Cette découverte géologique de Perseverance a surpris la NASA
Sylvie Montard - 30 août 2022

Image RMI de la roche Cine par l’instrument SuperCam montrant la texture de cumulat grenu riche en olivine. L’olivine est le premier minéral à cristalliser lors des processus magmatiques dont il est un excellent traceur. Crédits : NASA/JPL-Caltech/LANL/CNES/CNRS/IRAP
L'arrivée du rover Perseverance sur Mars, qui est venu complémenter les instruments déjà sur place comme le rover Curiosity ou la station sismologique InSight, a permis d'explorer un nouvel environnement martien : le cratère Jezero. Les premières observations ont d'ailleurs rapidement permis d'établir que ce cratère était autrefois occupé par un vaste lac, alimenté par une rivière formant un delta.
Quatre publications parues le 25 août 2022 dans Science et Science Advances décrivent des découvertes géologiques étonnantes faites par Perseverance dans le fond du cratère. Les scientifiques n’ont pas observé les roches sédimentaires formées par l’accumulation de sable et de boue qu’ils s’attendaient à trouver dans un ancien environnement aquatique, mais ont identifié à la place des roches magmatiques dérivant de processus volcaniques profonds ou de surface.

Crédits : NASA/JPL
Certaines de ces roches se sont formées par l’accumulation de grains millimétriques d’olivine, comme on en trouve dans certaines météorites martiennes. La présence de ces roches grenues à la surface de Mars est étonnante. En effet, sur Terre, de telles roches se forment en profondeur dans des chambres magmatiques par refroidissement lent du magma, puis sont exhumées à la surface par l’érosion et la tectonique des plaques.
Au-dessus de cette unité, des roches de composition basaltique ont été identifiées, probablement mises en place par des coulées de lave plus tardives. Par ailleurs, l’observation de minéraux secondaires témoigne d’une altération due à l’eau de toutes ces roches. Ainsi de l’eau liquide a bien circulé après leur formation : soit durant l’épisode lacustre qui a permis la formation du delta, soit à l’occasion d’écoulements aqueux postérieurs.

Crédits : NASA/JPL
A ce jour 12 échantillons de roches ont été récoltés pour être rapportés sur Terre en 2033. Ces quatre publications démontrent que ces premiers échantillons ont un fort potentiel scientifique pour des problématiques géologiques (magmatisme, champ magnétique passé, géochronologie, etc.), géochimiques (cycle de l’eau et du carbone) mais aussi exobiologiques, car ce type de roches altérées est connu pour constituer une niche pour la vie sur Terre et pour en préserver des traces fossiles sous forme de biosignatures.
L’instrument franco-américain Supercam a largement contribué à ces découvertes par l’imagerie de la texture des roches grâce à sa caméra à très haute résolution, et par l’analyse de leur chimie et de leur minéralogie grâce à ses différents spectromètres.

Crédits : NASA/JPL
SuperCam a réalisé plus de 1400 analyses qui documentent précisément la géologie le long du parcours du rover et a réalisé une prouesse technologique sans précédent en acquérant les premiers spectres Raman et infrarouge à la surface de Mars.
« Les roches ignées que nous avons collectées nous permettra de dater la présence du lac dans le cratère Jezero. Cela répondra à certaines questions majeures : quand le climat de Mars a-t-il été propice aux lacs et aux rivières à sa surface ? Et quand a-t-il basculé vers les conditions très froides et sèches que nous connaissons aujourd'hui ? », explique le géochimiste Kenneth Farley, scientifique de la mission Perseverance. Ces différentes couches de roches dévoileront leurs secrets grâce à des analyses en laboratoire sur Terre, car les outils d'analyse géochimique nécessaires à la datation sont trop volumineux pour avoir été placés à bord de Perseverance. Source:
cnrs.fr