Voilà des années que la science rêve de résoudre un mystère : La vie existe-t-elle ailleurs que sur Terre ? Aujourd'hui, notre planète est à notre connaissance la seule qui abrite la vie. Mais il y a des milliards d'années, Mars était similaire à la Terre. Alors, la vie aurait-elle pu prospérer sur la planète rouge dans le passé ?
Il y a environ 3,5 milliards d'années, la Terre était couverte de volcans et de mers chaudes peu profondes, enveloppée d'une atmosphère malodorante de méthane et de dioxyde de carbone. Il y avait peu de vie à proprement parler, à l'exception de simples microbes qui pouvaient survivre dans des environnements sans oxygène.
Puis vinrent les cyanobactéries, qui se gavaient de la lumière du soleil, consommaient le dioxyde de carbone contenu dans les océans, et rejetaient progressivement de l'oxygène dans l'atmosphère. C'était le coup de pouce indispensable pour que la nature puisse créer des organismes plus complexes.
Cette cyanobactérie appelée Phormidium corium, de couleur pourpre et violet, est souvent confondue avec une algue. La Terre a conservé dans quelques rares endroits des traces de ces premières formes de vie. Dans le nord-ouest de l'Australie, il y a environ 3,5 milliards d'années, la région de Pilbara était couverte de mers peu profondes et de lacs. C'est dans ce paysage ancien que les scientifiques ont trouvé certaines des plus anciennes preuves de la vie sur Terre. Dans ce paysage rouge du Pilbara, des géologues se sont intéressés à une zone bien particulière, connu sous le nom de formation Dresser, qui était autrefois une source chaude volcanique. Les formes ondulées que ses roches contiennent sont des stromatolites, des colonies de microbes (principalement des cyanobactéries) qui se sont accumulées au fil du temps dans des eaux peu profondes.
Des scientifiques explorent les roches de la formation Dresser, dans les paysages rouges du Pilbara, en Australie. De nos jours, il existe encore des stromatolites vivants dans quelques endroits sur Terre, tels que Shark Bay en Australie occidentale et aux Bahamas, ainsi que dans les lacs super salés, tels que le lac Thetis (également situés en Australie occidentale) et sous la glace, dans les lacs d'eau douce en Antarctique. Chaque couche de microbes est recouverte d'une substance gluante qui emprisonne les sédiments. Les microbes se développent à travers la couche de sédiments pour atteindre le soleil. Au fur et à mesure que le monticule se construit, les sédiments inférieurs durcissent en roches et les microbes qui n'atteignent plus le soleil meurent.
Shark Bay en Australie, un des seuls endroits au monde où les stromatolites continuent à croître. A l'époque où la Terre était beaucoup plus jeune, des tapis microbiens bleu-vert visqueux recouvraient donc la planète, formant des motifs irréguliers et aléatoires dans les roches. Les communautés microbiennes créaient ces formes, car c'était probablement le moyen le plus efficace pour qu'elles atteignent le soleil. Les roches du Pilbara donnent un aperçu de ce à quoi Mars aurait pu ressembler il y a des milliards d'années, lorsque les deux planètes étaient similaires.
Aujourd'hui, Mars est un endroit froid, sec et inhospitalier avec une fine atmosphère de dioxyde de carbone. Mais une carte qui montre la topographie de la planète, suggère que l'eau était autrefois abondante à la surface de la planète. Alors que le rouge marque les hautes terres couvertes de cratères créés par les astéroïdes, le bleu indique les zones où l'eau a probablement coulé. Ces zones contiennent très peu de cratères, car l'eau est un formidable amortisseur.
La couleur bleue de la carte montre des zones peu cratérisées, car la chute des astéroïdes était amortie par la présence d'eau liquide. Depuis plusieurs années, la NASA s'intéresse beaucoup à ces endroits qui pourraient contenir des traces d'une vie passée sur Mars, comme le cratère Jezero. Il y a trois milliards d'années, il formait un lac de 47 kilomètres de large, alimenté par une rivière. Celle-ci traversait une vallée, amenant du sable et de la terre, pour se déployer dans un vaste delta. Dans cet environnement, des couches de sédiments se sont lentement accumulés au fil du temps. Et c'est ici que les scientifiques espèrent trouver des signes de vie ancienne, comme des stromatolites piégées pendant des milliards d'années.
Le rover Perseverance s'apprête à inspecter ce cratère. Il commencera bientôt son périple à travers le lac asséché, à la recherche de roches contenant des fossiles ou des éléments chimiques qui prouveraient que la vie a émergé sur la planète rouge.
Le delta qui se jette dans le cratère Jezero sera particulièrement examiné, car il contient de l'argile et des carbonates. Cet intérêt est justifié par le fait que les deltas terrestres sont aussi constitués de sable et d'argile apportés par les rivières. Les chercheurs s'intéressent surtout au carbonate de calcium, car sa présence est abondante au bord de cet ancien lac martien.
Voici à quoi devait ressembler le cratère Jezero il y a quelques milliards d'années, quand de l'eau liquide s'écoulait à la surface de la planète rouge. Sur Terre, ce minéral est observé dans les environnements marins en tant que sous-produit de la photosynthèse par les microbes, et il cimente les couches de stromatolites. C'est aussi un élément essentiel des récifs coralliens. En effet, dans les eaux peu profondes, les organismes vivants précipitent suffisamment de carbonate de calcium pour créer des récifs. L'un des endroits du Pilbara qui ressemble le plus au cratère Jezero, est une formation rocheuse connue sous le nom de Fortescue Group, située entre Marble Bar et Telfer. Des stromatolites fossiles présents dans ces roches vieilles de 2,7 milliards d'années témoignent d'un ancien système de rivières et de lacs qui s'étendait sur des centaines de kilomètres.
Alors que la Terre a développé des formes de vie complexes et que l'activité tectonique a remodelé une grande partie de nos paysages, Mars est devenue inhospitalière. Une grande partie de son atmosphère s'est évaporée dans l'espace, et les vastes océans, rivières et lacs ont disparu. Bombardé par les radiations du soleil, la surface martienne est devenue stérile. Toute vie qui existait dans le cratère de Jezero est révolue depuis longtemps. Si des organismes vivants veulent survivre aujourd'hui sur Mars, ils doivent se cacher dans les profondeurs, sous la surface froide de la planète rouge.
Il existe un autre endroit extraordinaire en Australie qui montre comment cela pourrait arriver. Il s'agit du lac Gilmore, dans le pays de Ngadju, au bord de la plaine de Nullarbor.
Ce lac asséché est recouvert de cristaux de gypse et de sel. Ces conditions sont similaires à ce qui pourrait exister dans des endroits sur Mars, car la présence de gypse signifie qu'il y a du soufre, du fer, et une certaine salinité. Bien que la surface du lac soit asséché, il n'est pas difficile de trouver de l'eau bouillonnante sous la surface. Cette eau est trois fois plus salée que l'eau de mer et extrêmement acide, avec un pH de 3,5. Pourtant, cet environnement extrême contient des microbes. Et il y a au moins un endroit sur Mars où les conditions pourraient être similaires.

Le pôle sud de Mars cache des lacs souterrains, à 1,5 km de profondeur.
Selon une analyse récente des données de la sonde ExoMars Trace Gas Orbiter, il existe plusieurs lacs souterrains à 1,5 km sous la surface du pôle sud de Mars. Et là où il y a de l'eau, il y a peut-être de la vie. Une telle découverte bouleverserait à jamais notre vision de l'univers, qui cache probablement de multiples mondes habités par des microbes, ou des formes de vie plus développées. Avec l'atterrissage du rover Perseverance, nous n'avons jamais été aussi proches de savoir si la vie existe ailleurs que sur Terre.